Ovide écrit une nouvelle lettre à Fabia pour lui dire qu'elle n'en fait pas assez pour obtenir une amélioration de son sort.
Allez, Fabia ! On force un peu son naturel et on va trouver l'empereur pour lui dire de faire un peu bouger les lignes !...
Philoctète à Lemnos. Lécythe aryballisque attique à figures rouges
Lorsque tu reçois une nouvelle lettre du Pont,
Pâlis-tu, et ta main tremble-t-elle en l’ouvrant ?
Ne crains rien : je vais bien et mon corps qui était avant
Sans résistance aux épreuves et sans vigueur
Tient bon et s’endurcit à force d’être malmené ;
Ou plutôt, je n’ai pas le loisir d’aller mal.
Par contre, mon moral est au plus bas ; le temps n’y a
Rien fait : je suis tout aussi déprimé qu’avant.
Les plaies qui devaient se fermer à la longue, à leur rythme,
Me font souffrir comme feraient des plaies récentes : 10
Un mal sans gravité diminue, les années passant ;
Un mal plus important s’aggrave avec le temps.
Philoctète a nourri presque dix ans l’infecte plaie
Qu’un serpent gonflé de venin lui avait faite.
Une incurable lésion aurait fait périr Télèphe
S’il n’eût été soigné par qui l’avait atteint.
Que celui qui m’a blessé veuille guérir ma blessure
– Tel est mon souhait – si je n’ai pas commis de crime,
Qu’il se contente de ce que j’ai déjà enduré,
Qu’il prélève un peu d’eau sur une mer immense ; 20
Même en puisant beaucoup, il laissera beaucoup d’aigreur
Et ma peine, allégée, demeurera entière :
Les coquillages de la grève et les roses d’un beau
Jardin, les graines du pavot soporifique,
Les bêtes de la forêt, les poissons nageant dans l’onde,
Les plumes de l’oiseau qui bat l’air vaporeux
Sont aussi nombreux que mes maux. Qui voudrait les compter
Voudrait compter les flots de la mer d’Icarie.
Même si je taisais les affreux dangers de la mer,
Les périls de la route et les poignards tirés, 30
Je n’en vivrais pas moins au bout du vaste monde et en
Terre barbare, entouré d’ennemis cruels.
Je partirais loin d’ici – car je n’ai tué personne –
Si, comme il se devrait, tu prenais soin de moi.
Ce dieu, le fondement de la puissance des Romains,
Fut souvent un vainqueur clément pour l’ennemi.
Qu’attends-tu ? Que crains-tu ? Va le voir, fais-lui ta demande ;
Nul n’est plus doux que lui dans l’immense univers.
Que vais-je faire, hélas ! si tous mes proches m’abandonnent ?
Toi aussi, quand le joug se rompt, tu te retires ? 40
Où aller ? Où chercher un réconfort à ma misère ?
Nulle ancre, désormais, ne retient mon bateau.
A toi de voir. Moi, je me réfugie, bien qu’il m’en veuille,
A son autel sacré – qui chasse un suppliant ?
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