Mais la douleur ne me laisse
pas longtemps immobile, elle m'excite bientôt, elle m'excite, et j'appelle
Thésée de toute la force de ma voix. Où fuis-tu ? m'écrié-je ; reviens, barbare
Thésée, tourne de ce côté ton vaisseau ; il n'emporte pas tous ceux qui le doivent monter."
Telles furent mes prières ; les
sanglots suppléaient à ce qui manquait à ma voix. Des coups accompagnaient les
paroles que je prononçais.
Comme tu ne m'entendais pas, j'étendis vers toi, pour
que tu pusses au moins m'apercevoir, mes bras qui te faisaient des signaux.
J'attachai à une longue verge un voile blanc, pour rappeler mon souvenir à ceux
qui m'oubliaient. Déjà l'espace te dérobait à ma vue. Alors enfin je pleurai,
car la douleur avait arrêté jusque-là le cours de mes larmes. Que pouvaient
faire de mieux mes yeux, que de me pleurer moi-même, puisqu'ils avaient cessé
de voir ton navire ? Ou j'errai seule et les cheveux en désordre, semblable à
une bacchante agitée par le dieu qu'adore le peuple d'Ogygès, ou,
les regards attachés sur la mer, je m'assis sur un rocher, aussi froide, aussi
insensible que la pierre même qui me servait de siège.
Traduction Théophile Baudement
Photo et montage Isabelle Jouteur copyright ©
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