jeudi 26 avril 2018

Palazzo Bianco

Je vous amène aujourd'hui au Palazzo Bianco de Gênes.
Vous avez peut-être traversé la capitale de la Ligurie alors que vous rouliez en direction de Florence ou de Rome. Vous avez alors emprunté un de ces viaducs vertigineux qui surplombent la ville et vous donnent envie de ne pas vous y arrêter...
Erreur - que j'ai longtemps commise !... Arrêtez-vous à Gênes, et parcourez ses rues, découvrez ses églises, visitez ses palais...
Aujourd'hui, nous ferons une halte au Palazzo Bianco, où Vénus est particulièrement à l'honneur. Jugez plutôt...
La voici, sous le pinceau de Luca Cambiaso (1527-1585), tentant d'empêcher le bel Adonis de partir à la chasse en cachant sa corne de chasseur...


Peine perdue...
Voici le récit que fait Ovide de la dernière chasse d'Adonis.


                                                                   Un jour,
Les chiens, suivant sa trace sans faillir, firent sortir
Un sanglier de sa bauge. Il allait quitter les bois
Lorsque le jeune Adonis l’atteignit d’un coup au flanc.
Aussitôt son boutoir recourbé fait tomber l’épieu
Ensanglanté ; Adonis, tout tremblant, cherche un abri.
La bête le poursuit, farouche, et plante ses défenses
Dans son aine et l’étend, moribond, sur le sable fauve.
Parcourant les airs sur son char léger, la Cythérée
N’avait pas encore atteint Chypre, emportée par ses cygnes.
Reconnaissant de loin les plaintes du mourant, vers lui
Elle détourna ses blancs oiseaux, et vit de là- haut
Adonis rouler dans son propre sang et rendre l’âme.
Elle saute du char, s’arrache voiles et cheveux
Et se frappe le sein d’une main peu faite pour ça.
Accusant les destins, elle dit : « Non, vous n’aurez pas
Le dernier mot. Le souvenir de mon deuil, Adonis,
Restera toujours. La représentation, chaque année,
De ta mort reproduira les souffrances que je vis,
Et ton sang deviendra une fleur. N’as-tu pas, jadis,
Perséphone, obtenu de changer en menthe odorante
Une femme ? M’interdira-t-on de métamorphoser
Un héros, fils de Cinyras ? ». Cela dit, elle verse
Un nectar parfumé sur le sang qui, à ce contact,
Bouillonne comme fait la bulle transparente
A la surface d’un fauve marais. Pas plus d’une heure
Après, une fleur naquit du sang, rouge comme lui,
Comme la fleur de la grenade qui cache ses grains
Sous une souple écorce. Mais on n’en jouit pas longtemps :
Le vent détache ses pétales si fragiles et
Légers, si mal fixés, ce vent qui lui donne son nom.
Métamorphoses, X, 709-739
Nous voilà donc doublement instruits, sur la mort d'Adonis et sur l'origine de l'anémone...

Autre scène, autre peintre avec cette oeuvre d'Andrea Semino (1526-1594) représentant Vénus avec Cupidon.

Elle semble lui donner son arc en pensant à celui à qui elle destine la flèche qu'elle tient de sa main droite. N'y a-t-il pas un air de vengeance dans son regard ?...
Mais un accident est vite arrivé, et Vénus pourrait bien se blesser involontairement et tomber soudain amoureuse. D'Adonis, par exemple...

Finissons, pour aujourd'hui, par un grand maître, Pierre Paul Rubens (1577-1640) et par un autre grand classique : Vénus et Mars.

Une Vénus plantureuse - on s'en serait douté... Un Mars martial... Un Cupidon joueur... De la couleur, de la matière - celle, par exemple, de la poitrine de Vénus, dans laquelle Mars enfonce ses doigts sans  délicatesse, tout en pensant à autre chose - à la guerre, pour laquelle il s'apprête à partir ?
A l'arrière plan, Bacchus lève une coupe que Vénus, aidée de Mars, vient de remplir. Ce ne serait donc pas le vin qui incite à l'amour mais plutôt celui qu'on boit avant d'aller se battre, pour se donner du courage. Du courage "hollandais", disent les Anglais...
A moins, finalement, que Mars n'arrive de la guerre. Bacchus serait donc là pour rappeler que "Sans Cérès et Bacchus, Vénus a froid" (Térence)...

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