dimanche 17 septembre 2017

Une lettre de Constanţa

J'ai reçu voici quelque temps une lettre que j'ai ouverte avec émotion : elle venait de Constanţa...


Et, plus émouvant encore, elle contenait le livre suivant :


Un roman inspiré de la vie d'Ovide et écrit par Stefan Cucu, un universitaire roumain qui a passé sa vie professionnelle à parcourir l'oeuvre de notre poète...
La lettre m'est parvenue en quelques jours ; elle était recommandée et ne risquait pas de s'égarer. Aussi n'ai-je pas pu m'empêcher de penser à cette élégie dans laquelle Ovide se plaint à un ami de ne pas recevoir de lettre de lui et l'excuse en supposant que les lettres sont parties mais ne sont pas arrivées...


IV, 7 : Bis me sol adiit gelidae post frigora brumae…

J’ai revu deux fois le soleil après un froid hiver,
            Deux fois, dans les Poissons, il a fini sa route.
De tout ce temps, pourquoi ta main n’a-t-elle pas pris soin
            De m’écrire ne serait-ce que quelques vers ?
Pourquoi ton amitié s’est-elle relâchée quand d’autres
            M’écrivaient, sans que je fusse intime avec eux ?
Pourquoi, chaque fois que je décachetais une lettre,
            Avais-je l’espoir d’y trouver ta signature ?
Fassent les dieux que souvent tu m’aies écrit sans qu’aucun
            De tes nombreux courriers ne me soit parvenu.
Il en est ainsi, j’en suis sûr, et j’aurais moins de mal
            A croire à la Gorgone aux cheveux de serpents,
Aux chiens placés à l’aine de Scylla, à la Chimère
            Mi-dragon, mi-lionne et ceinturée de flammes,
Aux chevaux dont le poitrail rejoint le poitrail d’un homme,
            Et à l’homme aux trois corps, et au chien aux trois têtes,
A la Sphinge et aux Harpyes et aux Géants anguipèdes,
            A Gyas aux cent bras, à l’homme mi-taureau,
Oui, j’aurais moins de mal, très cher, à croire à tout cela
            Qu’à ta métamorphose en ami négligent.
Nous sommes séparés par bien des monts et des chemins,
            Des fleuves et des mers nombreuses et des plaines.
Que sur tant de lettres parties, si peu soient arrivées
            Entre mes mains s’explique par mille raisons ;
Triomphe de mille raisons en m’écrivant souvent
            Et m’évitant, ami, de toujours t’excuser.
 

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