mardi 21 janvier 2025

Semele de Georg Friedrich Haendel au théâtre des Champs-Elysées

Si vous avez l'occasion de passer par Paris entre le 6 et le 15 février, profitez-en pour passer par le théâtre des Champs-Elysées : vous pourrez y assister à une nouvelle production de Semele de Georg Friedrich Haendel.


A la direction, Emmanuelle Haïm ; à la mise en scène, Olivier Mears...


Avec dans le rôle de Sémélé, Pretty Yende et dans celui de Jupiter, Ben Bliss...

Pour plus de détails sur le spectacle, cliquez ici :

https://www.theatrechampselysees.fr/saison-2024-2025/opera-mis-en-scene/semele

Et pour remonter à la source ovidienne des Métamorphoses, III, 288-312, voici ma traduction.

Bonne lecture, bon spectacle !

                                   Voici qu’un nouveau grief s’ajoute
                 Au précédent : Junon s’afflige de voir Sémélé
                 Grosse du grand Jupiter ; elle va le quereller,
                 Mais : « A quoi m’ont servi, se dit-elle, tant de querelles ?
                 C’est elle que je dois viser, elle que je perdrai
                 Si je suis Junon la très grande, si je mérite de
                 Tenir ce sceptre orné de pierreries, si je suis reine,
                 Epouse et sœur — sœur, je le suis — de Jupiter. Mais non...
                 Il l’a comblée furtivement ; l’honneur est presque sauf.
                 Que dis-je ! Elle est enceinte, son ventre étale son forfait ;
                 Et pour devenir mère, ce que je n’obtiens qu’avec peine,
                 Il lui faut Jupiter ; quelle assurance en sa beauté...
                 Mais elle déchantera : mon père n’est pas Saturne
                 Si son Jupiter ne la plonge pas dans l’eau du Styx. »
                 Elle quitte alors son trône, et sous un nuage d’or,
                 Elle va chez Sémélé, sans sortir de ce nuage
                 Avant d’avoir pris les traits d’une vieille aux tempes grises,
                 A la peau sillonnée de rides, ratatinée, et qui
                 Avance à pas tremblants ; elle vieillit aussi sa voix :
                 C’est Béroé d’Epidaure, nourrice de Sémélé.
                 Elles parlèrent beaucoup et en vinrent à nommer
                 Jupiter ; celle qui dirigeait tout soupire et dit :
                « Je te le souhaite ; mais rien n’est moins sûr : combien sont entrés,
                 Prenant le nom d’un dieu, dans le lit d’une honnête femme ?
                 Mais qu’il soit Jupiter ne suffit pas : qu’il donne un gage
                 De son amour. S’il est bien ce qu’il prétend, qu’il t’étreigne
                 Exactement comme il étreint la hautaine Junon.
                 Accueille-le revêtu de ses attributs divins. »
                 Junon avait fait ce qu’elle voulait de Sémélé ;
                 La naïve enfant demande à Jupiter “quelque chose”.
                 Le dieu répond  : « Choisis ; je ne te refuserai rien,
                 Et pour mieux te convaincre, je prendrai à témoin le Styx,
                 Dieu tout-puissant qui, lui aussi, remplit d’effroi les dieux. »
                 Son malheur fait sa joie ; Sémélé va périr : son amant
                 Complaisant lui a remis trop de pouvoir. « Comme quand
                 Junon t’enlace et que vous vous soumettez à Vénus,
                 Donne-toi, dit-elle, à moi. » Le dieu voulut retenir
                 Ses mots ; trop tard : ils avaient déjà fusé dans les airs.
                 Il gémit : elle ne peut pas n’avoir pas fait sa demande,
                 Il ne peut n’avoir pas promis. Aussi regagna-t-il
                 Tristement les hauteurs du ciel, et d’un signe assembla
                 Les dociles nuées ; il y ajoute orage, éclairs
                 Mêlés au vent, tonnerre, et la foudre que nul n’évite.
                 Cependant il fait de son mieux pour contenir ses forces ;
                 Le feu dont il avait terrassé Typhée aux cent bras,
                 Aujourd’hui, il y renonce : c’est une arme trop sauvage.
                 Il en est une plus légère, où les Cyclopes ont
                 Fait entrer une flamme moins cruelle, moins de colère ;
                 Les dieux la nomment “foudre seconde”. Il la prend et se rend
                 Chez Agénor. La mortelle ne put pas soutenir
                 Le céleste fracas : les dons de son époux l’embrasent.
                 L’enfant est arraché avant terme de l’utérus
                 Maternel, et cousu tout frêle — est-ce digne de foi ? —
                 Dans la cuisse de son père, où finit la gestation.